Le sénateur Gaston Flosse , secrétaire départemental de l’UMP assistait le samedi 31 Mars 2007 au grand meeting organisé par « La Coordination Nationale des Comités de Soutien des originaires d’Outre-mer à Nicolas Sarkozy » au Méridien Montparnasse à Paris.
Edouard Fritch, coordinateur des comités de soutien à Nicolas Sarkozy en Polynésie française, Bruno Sandras, secrétaire général du Tahoeraa, Pascale Haiti représentante à l’Assemblée de Polynésie française et de Teva Rohfritsch, ministre de l'Economie, accompagnaient le sénateur pour ce grand évènement.
Les ultramarins se sont déplacés massivement pour soutenir le candidat de l’UMP et ont réservé un vibrant accueil à Nicolas Sarkozy, venu présenter ses engagements.
Nicolas Sarkozy s’est engagé en outre, sur l’ensemble de ses propositions issues des groupes de travail des Comités de Soutien :
* Une Maison de l’outre-mer à Paris
* L’instauration de « quotas » de places réservés aux étudiants d’Outre-mer ; une maison des étudiants de l’outre-mer à la Cité Universitaire Internationale (des contacts avancés sont en cours) ; des sanctions en cas de refus de la caution outre-mer pour la location d’un logement et des refus de prêts bancaires lorsque l’intéressé veut investir outre-mer ; * La mise en œuvre d’un dispositif « mobilité » en faveur des fonctionnaires avec des compétences locales, permettant en outre le regroupement familial ;
* L’installation d’une délégation interministérielle à l’égalité des chances pour l’outre-mer et les originaires d’outre-mer ;
* La formation des policiers et des gendarmes à la lutte contre les discriminations;
* Le changement des règles du CSA pour une meilleure prise en compte des spécificités de l’outre-mer dans les chaînes publiques.
Lire l'intégralité du discours prononcé par Nicolas Sarkozy
Discours de Nicolas SARKOZY
Rencontre avec les Ultramarins de métropole
Paris - samedi 31 mars 2007
Mes chers amis,
Je suis profondément touché de vous voir si nombreux ce soir. Cela me fait
chaud au coeur de sentir votre soutien, de savoir que je peux compter sur vous.
Pour moi, l’accès à la plus haute fonction de l’Etat n’est pas une fin en soi. Si je
mène ce combat, c’est que j’ai l’intime conviction que les choses ne peuvent plus
continuer comme avant.
Que vous soyez de sensibilité de droite ou de gauche, peu importe ! Ce qui nous
réunit, ce soir, dépasse ce genre de considérations. Parce que ce qui nous
fédère, c’est, tout simplement, l’amour de l’outre-mer. Je ressens votre volonté
de changement dans la façon de faire de la politique. Parler avec franchise,
considérer que les mots engagent pour l’avenir et que, par conséquent, on ne
peut pas promettre tout et son contraire ; voilà ce que vous attendez !
Ce soir, je sais qu’il y a, dans cette salle, une majorité de Français originaire
d’outre-mer qui vivent depuis longtemps en métropole. Mais il y a, aussi, de
nombreux compatriotes d’outre-mer qui ont fait le chemin pour nous rejoindre et
je veux les saluer. C’est important car on ne peut pas séparer les Ultramarins de
métropole de ceux restés au pays, comme s’il s’agissait de deux catégories de
populations totalement différentes! Les familles, bien que séparées, restent des
familles, les étudiants viennent suivre leur cursus et repartent, les fonctionnaires
changent d’affectations… Les échanges sont donc incessants. Et c’est cela qui fait
l’originalité d’un grand pays comme la France. Nous devons être, tous, fiers de
former une communauté en mouvement qui est rassemblée par une
communauté de valeurs.
Ce soir, je veux m’adresser à vous en tant que Français. Je ne suis pas de ceux
qui entretiennent les communautarismes. Je le rappelais la semaine dernière, en
Martinique : la France n’est ni une race, ni une ethnie. C’est une façon d’être, de
vivre, c’est un idéal, une espérance. C’est donc à vous tous que je veux parler,
du fond du coeur et sans fard. A vous tous, Français à part entière !
Cela fait maintenant longtemps que je m’investis sur les questions de l’outremer.
Je n’ai pas attendu les dernières semaines de la campagne présidentielle
pour commencer à m’intéresser à vous. Non, mon engagement est un
engagement de long terme parce que je sais que votre identité est complexe et,
qu’en vérité, il y a autant d’identités et de réalités qu’il y a de collectivités
d’outre-mer.
Le projet que j’ai proposé pour l’outre-mer est un projet sérieux. Il n’est pas un
simple catalogue de mesures. Il propose une stratégie et n’hésite pas à être
sélectif pour être crédible. Il est le fruit d’une expérience personnelle acquise au
cours de nombreux voyages effectués durant ces deux dernières années. Il est,
aussi, le fruit de nombreuses rencontres qui m’ont enrichi et, parfois, ont modifié
ma perception des choses.
Lors de la convention du 12 juillet dernier, organisés dans le cadre de l’UMP et
exclusivement consacrée à l’outre-mer—une première —j’ai eu l’occasion de
dessiner les axes de mon projet pour la France d’outre-mer. Depuis, ce projet a
été enrichi et précisé mais ma philosophie n’a pas changé. Pour moi, l’outre-mer
n’est pas un « problème », « un dossier » ou une « charge budgétaire ». L’outremer
est pour la France un formidable atout, une fenêtre ouverte sur le monde.
C’est un potentiel humain, écologique et économique extraordinaire pour notre
nation !
L’outre-mer, ce sont trois millions et demi de Français, dont un million qui vivent
en métropole ! L’outre-mer, c’est le poumon écologique que constitue la forêt
guyanaise, ce sont les plus beaux lagons du monde en Calédonie, en Polynésie
ou à Mayotte ! L’outre-mer, c’est un domaine maritime de plus de 11 millions de
km2 qui fait de la France la deuxième puissance maritime du monde et ce sont
d’extraordinaires réserves minières ! L’outre-mer, c’est, enfin, la France des trois
Océans, la France de plain-pied dans la mondialisation ! La Réunion, dans
l’Océan indien, est aux portes de l’Afrique et aux confins de la péninsule
indienne. La Guadeloupe, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et la Martinique relient,
dans l’Arc antillais, les deux Amériques. La Guyane est en Amazonie, alors que
les îles de Saint-Pierre et Miquelon sont tournées vers le Canada ; la Nouvelle-
Calédonie, Wallis et Futuna et la Polynésie française, dans l’Océan Pacifique, sont
à proximité de l’Asie et de l’Australie.
J’aimerais que chaque Français prenne conscience de la chance que nous avons
d’avoir un territoire si vaste, aux cultures si diverses. Mais cette réalité ne doit
pas occulter les difficultés rencontrées : celles du chômage, de l’insécurité, du
logement insalubre ou des problèmes de santés non résolus. Et c’est pour cela
que toute mon énergie, je la consacrerai à la résolution des problèmes concrets
rencontrés par nos concitoyens d’outre-mer. Je veux être le Président qui
s’attaquera aux vrais problèmes du quotidien, tels qu’ils sont exprimés par nos
concitoyens sur le terrain, et non tels qu’ils sont perçus par quelques personnes
bien établies à Paris. Je ne crois pas que la priorité pour l’outre-mer soit
l’évolution institutionnelle de tel ou tel territoire ou bien encore l’organisation de
festivals en tous genres. Les vrais problèmes sont ailleurs.
C’est pour cela que mes priorités opérationnelles s’articulent autour de trois
idées simples :
• Il nous faut continuer à reconnaître à la fois les spécificités et la diversité
de l’Outre-mer,
• Il nous faut définir des priorités autour des questions de sécurité et de
développement économique, avec des choix précis et une concentration
des efforts sur les secteurs réellement porteurs,
• Il nous faut développer une solidarité, qui ne se confonde pas avec
l’assistanat, et qui soit au service de l’égalité des chances.
Ces axes m’ont permis de décliner de multiples propositions que vous connaissez
pour la plupart. Ces propositions ont été étudiées avec minutie et sont réalistes.
Je n’en rappellerai que quelques-unes.
En matière de sécurité, je veux impliquer davantage les forces armées dans la
protection de nos territoires contre l’immigration clandestine massive ou les
grands trafics de drogue car je pense qu’il s’agit là d’un véritable enjeu de
souveraineté nationale. Je veux, aussi, remettre à niveau les prisons en outremer
car trop souvent elles ne sont pas dignes.
En matière économique, je veux tout faire pour créer les conditions d’un vrai
décollage économique de nos collectivités d’outre-mer. Ceci est, à mes yeux,
fondamental car ce n’est que par le développement d’activités endogènes que
l’on créera de l’emploi et des richesses. Ce ne n’est que par le développement
économique que l’on sortira les territoires d’outre-mer d’une relation d’assistanat
dont les Ultramarins ne veulent plus eux-mêmes !
Je connais mieux maintenant le caractère fier des Français d’outre-mer et je sais
qu’ils aspirent, avant tout, à pouvoir vivre du fruit de leur travail, debout ! C’est
pour cela que j’ai fait de nombreuses propositions fortes et précises en matière
économique. Je veux, en plus de la défiscalisation, créer dans les DOM des zones
franches globales d’activités ciblées sur des secteurs porteurs. J’ai eu à de
multiples reprises l’occasion d’expliquer le contenu de ces zones franches ; je n’y
reviens donc pas.
Pour les territoires où l’Etat ne dispose plus de la compétence fiscale, je souhaite
que la solidarité nationale s’exerce différemment. Je veux que l’on se concentre
sur la réalisation des infrastructures nécessaires au développement économique.
Je pense, par exemple, à la réalisation d’une piste longue à l’aéroport de
Pamandzi, à Mayotte, qui permettra d’exporter davantage de fret et de
développer le tourisme ou bien, encore, au soutien des projets miniers de la
Nouvelle-Calédonie. Je veux aussi développer, partout, une logique de pôle
d’excellence alliant entreprises, laboratoires de recherche et Universités, à
l’image de ce qui a été réalisé à la Réunion avec le pôle de compétitivité
« Qualitropic ».
Mon ambition pour l’outre-mer est à la fois simple et précise : je souhaite mettre
au coeur de mon projet chaque femme et chaque homme. Notre priorité doit être
tournée vers le développement, l’emploi et l’amélioration des conditions de vie
des Ultramarins.
Pour cela, il faut refaire du travail une valeur centrale. Car c’est en travaillant
davantage que nous créerons davantage de richesse et que nous pourrons
organiser une solidarité plus efficace envers les plus faibles. J’ai toujours pensé
que l’assistanat était la pire des politiques que ce soit en outre-mer ou en
métropole. L’assistanat aliène les hommes sans même qu’ils s’en aperçoivent. Je
veux construire une relation entre la puissance publique et les Français fondée
sur le respect de la dignité. Et cela passe par le fait de donner à chacun un
travail et de ne pas créer de droits qui ne soient assortis de devoirs.
Contrairement à ce que l’on entend parfois, cela ne veut pas dire que j’ai
l’intention de supprimer le RMI ! Pas du tout ! Cela veut dire que pour les
personnes en âge de travailler, les minima sociaux doivent être transitoires. Le
but doit rester la reprise d’activité. Concrètement, je veux que tout bénéficiaire
d’un minimum social ait une obligation effective d’activité, qu’il s’agisse d’une
formation ou d’un travail d’intérêt général.
Le corollaire de tout cela, c’est qu’il faut que le travail paye ! Je veux être le
Président du pouvoir d’achat. Le problème est général : les salaires sont trop bas
en France alors que les prix ont augmenté. Il faut donc redonner du pouvoir
d’achat à ceux qui travaillent, qui se lèvent tôt le matin. Les Français d’outre-mer
savent travailler. J’ai visité de nombreuses entreprises performantes à la
Réunion, en Guadeloupe ou en Martinique. J’ai visité, en métropole, des hôpitaux
et des commissariats où les Français d’outre-mer sont là, tôt le matin et tard le
soir. Vous savez mieux que quiconque ce que travailler signifie et je ne laisserai
personne caricaturer votre image !
Je veux, pour tous ces travailleurs, que les heures supplémentaires soient toutes
rémunérées 25% de plus que les heures normales, quelle que soit la taille de
l’entreprise, et qu’elles soient exonérées de toutes charges fiscales et sociales
afin qu’elles soient plus payantes pour les salariés et moins chères pour les
entreprises. Quatre heures de travail en plus par semaine sans charges, c’est
1.980 euros net en plus à la fin de l’année pour tout salarié rémunéré au SMIC.
Voilà la réalité concrète !
En matière d’éducation, il est aussi urgent d’agir plus efficacement! Nous n’avons
pas le droit de brader l’avenir de nos enfants. L’outre-mer compte une population
jeune très importante. 50% de la population a moins de 20 ans à Mayotte, 50%
de la population a moins de 25 ans en Guyane et en Nouvelle-Calédonie ! C’est
un atout si nous relevons le défi de la qualité de l’enseignement. C’est pour cela
que je veux donc renforcer les moyens dédiés au système éducatif pour répondre
aux besoins de scolarisation et de formation de la jeunesse ultramarine. Dans les
collectivités qui subissent une forte pression démographique et migratoire, il faut
assurer la scolarisation de tous les enfants dans des conditions acceptables et
promouvoir des formules d’écoles de la 2ème chance pour lutter contre l’échec
scolaire. Je souhaite également favoriser une meilleure articulation entre la
formation et l’emploi pour offrir un avenir à tous les jeunes, grâce à
l’enseignement professionnel mais aussi en favorisant les conventions avec les
plus grandes écoles de métropole. Car la jeunesse de l’outre-mer a droit à
l’excellence !
D’une façon plus générale, je veux réinstaurer l’Autorité au sein du système
éducatif. Je n’accepte pas que l’autorité des maîtres puisse être bafouée par
quelques trouble-fête. Pour moi, la scolarité, c’est aussi l’école de la vie en
société ; on y apprend ses codes et ses valeurs fondamentales, comme celle du
respect. Cela se traduit par des choses simples comme le fait que, lorsque le
maître rentre dans la classe, les élèves se lèvent !
Le logement est aussi une question fondamentale à mes yeux. Je sais que, dans
beaucoup de communes d’outre-mer, les moyens font défaut pour faire face à
l’enjeu de la construction de logements neufs. C’est pour cela que j’ai été le
premier à avoir préconisé de définir un taux de défiscalisation plus favorable pour
le financement du logement social locatif mais aussi pour le logement
intermédiaire en accession à la propriété. Tous les Français, qu’ils soient de
métropole ou d’outre-mer souhaitent devenir propriétaires de leurs logements et
je veux que ce rêve soit accessible à tous ceux qui vivent du fruit de leur travail !
Le logement n’est pas juste « un sujet comme un autre ». Il est l’élément de
base du cadre de vie, il fait partie de la dignité de la personne. Comment peut-on
espérer créer les conditions d’une réelle égalité des chances si nous laissons nos
enfants d’outre-mer vivre dans des habitations insalubres ?
La santé est un autre volet fondamental de la condition humaine. Il ne peut y
avoir deux poids et deux mesures en matière de santé. Les plateaux techniques
sont souvent performants en outre-mer. Mais les structures sont parfois encore
insuffisantes ; je pense notamment à la Guyane. Il y a, de plus, un certain
nombre de secteurs dans lesquels les insuffisances sont criantes ; par exemple,
la psychiatrie ou la prise en charge des toxicomanes aux Antilles.
Voilà quelques-unes de mes priorités pour l’outre-mer. Il y aurait bien d’autres
sujets à aborder mais je voudrais maintenant en venir aux questions qui
concernent plus directement les Ultramarins qui vivent en métropole.
*
Cela fait longtemps, là aussi, que je réfléchis aux problèmes qui sont les vôtres.
J’ai beaucoup écouté les différentes associations qui vous représentent. Je n’ai
pas toujours été d’accord sur toutes les revendications exprimées mais j’ai pris
conscience qu’il fallait faire plus et mieux pour prendre en compte la réalité de ce
que vous vivez. Je veux remercier, ce soir, Patrick KARAM dont le franc-parler a
su, à plusieurs reprises, me convaincre. Je veux aussi le remercier car il a su,
avec Marie-Dominique AESCHLIMANN, vous rassembler en un puissant réseau de
comités de soutien dont je mesure la valeur. Merci, aussi, à Léon BERTRAND, qui
a fédéré tous les élus d’outre-mer qui me soutiennent parfois au-delà des
traditionnels clivages politiques. J’ai besoin de vous, de vous tous, sans
exception !
Loin de vos territoires d’origine, je sais que votre positionnement dans la société
française n’est pas toujours facile. Je sais que vous êtes soucieux de défendre
votre identité française à part entière, en même temps que votre spécificité.
Mes amis, natifs ou originaires d’outre-mer, m’ont souvent décrit ce que vous
ressentiez comme l’expression d’un triple sentiment : un sentiment d’éviction,
d’amalgame et d’abandon. Sentiment d’éviction lorsque vous constatez, malgré
votre nombre, votre « invisibilité » dans la sphère publique, politique et
médiatique. Sentiment d’amalgame lorsque certains prétendent, à tort, vous
associer à une communauté noire d’origine africaine. Sentiment d’abandon,
parfois, lorsqu’en métropole depuis longtemps, vous ne vous sentez pas tout à
fait intégrés mais que, « de retour au pays », vous n’êtes pas, non plus, tout à
fait chez vous… Je pense qu’il y a là un vrai sujet qu’il faut aborder sans
démagogie mais avec énergie. C’est d’ailleurs pour cela que j’ai souhaité faire ce
qu’aucune autre formation politique n’avait fait jusqu’à maintenant : désigner
dans l’organigramme du parti que je dirige un Secrétaire national, Marie-
Dominique AESCHLIMANN, spécifiquement dédié aux Ultramarins de métropole.
Après avoir entendu vos messages portés, notamment, par la « Coordination
nationale des comités de soutien des originaires d’outre-mer », je veux vous
faire un certain nombre de propositions concrètes ce soir.
Je sais que la question identitaire est importante à vos yeux. Elle l’est aussi aux
miens. Car je suis convaincu que l’on ne peut être passionnément Français que si
l’on a su demeurer intensément soi-même, avec ses racines locales, son histoire,
sa culture, voire sa langue. Ma conviction, c’est que, dans une démocratie
mature, la République peut et doit faire davantage de place aux identités et
cultures d’Outre-mer car, en réalité, elles font partie de nous-même.
C’est la raison pour laquelle je suis favorable à l’enseignement des langues et
cultures régionales dans leurs territoires d’origine et que je suis même favorable
à leur enseignement en métropole lorsque que la demande est suffisamment
importante pour justifier un investissement du système éducatif. N’oublions pas
que le, les créoles constituent l’ensemble de langues régionales le plus important
de France par le nombre de locuteurs…
C’est aussi pour cela que le devoir de mémoire est, à mes yeux, important. Il
permet de construire l’avenir sur de nouvelles bases. Il n’y a plus de fauxsemblants
et de non-dits : l’Histoire est regardée en face. Le Président de la
République a fixé au 10 mai la journée nationale de commémoration de
l’abolition de l’esclavage. La nation, dans son ensemble, peut désormais prendre
conscience de ce qu’a été l’esclavage et de l’importance de lutter contre toutes
les formes modernes de cette infamie. Mais je sais qu’il y a d’autres dates
importantes pour les domiens de métropole concernant la mémoire de
l’esclavage, comme par exemple celle du 23 mai. Je saurai, le moment venu,
faire inscrire dans l’Histoire ces dates importantes.
Il faut, parallèlement à cela, combler le déficit de reconnaissance symbolique des
ultramarins. Cela peut prendre plusieurs formes.
Cela peut consister à corriger le déficit d’image de l’Outre-mer et des Ultramarins
dans les médias. Le paysage audio-visuel est certainement en partie responsable
du fait que l’Outre-mer soit mal connu et que son image soit souvent caricaturée.
C’est la raison pour laquelle j’intégrerai, dans les missions du CSA, celle de la
promotion de l’Outre-mer dans tous ses aspects culturels, historiques et
géographiques. Il ne s’agit pas, seulement, de la présentation quotidienne de la
météo des collectivités d’outre-mer. Il s’agit, surtout, de veiller à la recherche
d’un équilibre dans le traitement des sujets d’actualité mais aussi des émissions
de fond.
Combler le déficit de reconnaissance, c’est aussi promouvoir davantage, à talent
égal, des originaires d’outre-mer dans la sphère administrative aux postes
d’autorité. C’est dans cette logique que, comme Ministre de l’Intérieur, j’ai déjà
nommé, dans le corps préfectoral, plusieurs Hauts fonctionnaires talentueux
venant de l’Outre-mer et, notamment, trois Préfets et six Sous-préfets. C’est la
même dynamique qui doit nous animer en politique mais sans démagogie !
Combler le déficit de reconnaissance symbolique, c’est, enfin, mettre en lumière
les grands hommes et femmes que l’Outre-mer a donné à la France. C’est la
raison pour laquelle j’ai fait changer le nom de l’aéroport de la Martinique, le 16
janvier dernier, pour le baptiser du nom d’Aimé CESAIRE. Je l’ai fait malgré les
réticences administratives car jamais le nom d’un personnage vivant n’avait été
donné à un équipement de ce type. Je l’ai fait car je crois que c’est justice vis-àvis
du grand poète et de l’homme d’engagements et de paix qu’est Aimé
CESAIRE. C’est une façon de rappeler aux Français ce que notre culture, notre
identité nationale doit à l’Outre-mer.
Mais l’identité, il ne suffit pas de la reconnaître, il faut la faire vivre, lui permettre
de s’épanouir ! Je crois que la création d’un lieu consacré à l’Outre-mer pourrait
contribuer à cet épanouissement. L’idée d’une « Maison de l’Outre-mer » a
souvent été évoquée mais n’a jamais été suivie d’effets. Je pense pourtant que,
bien conçu, un lieu spécifiquement consacré à l’Outre-mer pourrait avoir tout son
sens. Ce serait un lieu de conservation et de valorisation des richesses des
différentes collectivités d’outre-mer mais aussi un lieu de rencontre et de
sociabilité pour des communautés souvent éparpillées. Ce pourrait être, par la
même occasion, un centre d’affaires pour des responsables économiques et
politiques qui ne cessent de voyager dans le but de développer leurs territoires.
Enfin, sur un plan plus pratique, je crois qu’il ne faut pas se cacher que les
Français d’Outre-mer ont à faire face à de nombreuses difficultés en métropole
que l’on ne soupçonne même pas. Ces difficultés économiques et sociales sont
réelles et souvent différentes de celles rencontrées par les Français issus de
l’immigration.
Elles sont de plusieurs ordres. Il peut s’agir, dans certains cas, comme lors de la
recherche d’un emploi, de véritables discriminations fondées sur la couleur de
peau. Il peut aussi s’agir de simples problèmes administratifs liés au
particularisme de la situation objective des Ultramarins. Ces problèmes
administratifs spécifiques se traduisent par de sérieuses difficultés dans la
recherche d’un logement ou dans la réalisation de certaines démarches
bancaires. Le rapport annuel de la Haute Autorité de Lutte contre les
Discriminations et pour l’Egalité (HALDE) de 2005 soulignait, par exemple, les
discriminations fréquentes en matière de logement que subissent les étudiants
ultramarins vivant en métropole, du fait que les bailleurs exigent que leur
caution soit domiciliée en métropole.
Quelles que soient leurs origines, ces discriminations sont inacceptables et
doivent être combattues avec force. Mais leur identification et leur résolution
demandent une capacité d’analyse et d’intervention forte et constante. C’est la
raison pour laquelle je souhaite créer une « Délégation interministérielle pour la
cohésion sociale et l’égalité des chances des Français d’Outre-mer et d’origine
ultra-marine ».
La mission du Délégué interministériel consistera à identifier tous les types de
discriminations objectives rencontrés et à proposer des solutions concrètes pour
y remédier. Cette Délégation interministérielle aura pour but d’assurer une
égalité réelle des Français d’Outre-mer devant les services publics et les services
privés à la personne : logement, services bancaire et téléphonique notamment.
Elle aura aussi comme mission la lutte contre les discriminations à l’embauche ou
celles relatives à la promotion sociale dans le secteur public et le secteur privé.
Elle pourra, enfin, faire des propositions en matière de lutte contre les
discriminations de nature culturelle : apprentissage des langues régionales
d’outre-mer en métropole, présence des Français d’Outre-mer dans les médias
audiovisuels, promotion et diffusion des cultures d’Outre-mer en métropole.
Sans attendre les premiers travaux de la Délégation interministérielle, je veux
formuler, dès à présent, quelques propositions qui me paraissent prioritaires et
sur lesquelles je m’engage.
Pour favoriser l’égalité des chances des étudiants d’origine ultramarine, je veux
créer une « Maison des étudiants de l’Outre-mer ». Elle sera probablement située
dans l’actuelle Cité universitaire internationale. Les premières démarches sont
déjà engagées.
Par ailleurs, je m’assurerai personnellement que les opérateurs immobiliers
respectent la législation que l’actuel Gouvernement a introduites pour interdire
les refus des cautions provenant de l’outre-mer. Ces refus représentaient un
obstacle inacceptable au logement des Ultramarins en métropole et notamment
au logement des étudiants ! Or, même après le changement de législation, il
semblerait qu’un certain nombre d’opérateurs ne jouent toujours pas le jeu. Cela
entrave la mobilité des étudiants et les échanges entre l’outre-mer et la
métropole. Je ne laisserai pas cette situation perdurer. On est en France ou on
ne l’est pas!
Pour lutter contre les discriminations, je veux, d’ailleurs, mettre en place des
formations spécifiques pour les policiers et les gendarmes afin qu’ils puissent
combattre plus efficacement toutes les formes de discriminations. Ces
discriminations sont parfois très insidieuses et discrètes mais, pourtant, elles
sont bien réelles ! Cela justifie, à mon sens, de spécialiser des fonctionnaires de
la police de notre République car les discriminations et les racismes sont le
cancer de notre société.
Je veux, enfin, tout faire pour que, malgré les distances, les liens de familles
puissent subsister entre les Ultramarins qui vivent en outre-mer et ceux qui
vivent en métropole. Ce qui est en jeu, c’est le maintien de la cohésion des
familles et l’égalité des chances des jeunes en cours de formation.
C’est la raison pour laquelle je considère depuis déjà bien longtemps que la
continuité territoriale, aérienne et numérique, est une absolue priorité. Et je n’ai
pas attendu pour agir puisque, en tant que Ministre, je me suis engagé pour
cette cause comme aucun Ministre de l’Intérieur ne l’avait fait jusque là. En
matière de continuité aérienne notamment, je viens de faire modifier les règles
qui restreignaient jusque là la concurrence sur les destinations des Départements
d’outre-mer. Dorénavant, les compagnies charters pourront vendre des vols
« charters secs », sans séjour d’hôtel associé, sur l’outre-mer. Cela leur était
interdit jusqu’à présent. C’est une première étape concrète, même si d’autres
mesures devront être prises.
La modification des modalités de prise de congés bonifiés est une autre piste
intéressante. Mon intention n’est évidemment pas de remettre en cause les
congés bonifiés, bien au contraire ! En revanche, je pense que le système actuel
est trop rigide et qu’il se retourne parfois contre l’intérêt des Ultramarins euxmêmes.
Je propose un dispositif « gagnant/gagnant », qui aurait pour effet de
mieux étaler les périodes de congés et, donc, de favoriser une baisse des tarifs
des billets d’avion. Il consiste à laisser les agents choisir la durée de leurs congés
et à leur attribuer un chèque, d’un montant équivalent à un tarif moyen de haute
saison, dont ils pourront conserver le solde pour leurs dépenses de vacances.
Ainsi, tout le monde y gagnerait : l’agent, l’administration, qui ne jouerait plus
les « agents de voyage », et même les compagnies aériennes, qui verraient leur
clientèle mieux répartie dans le temps.
J’ajoute, pour être complet sur cette importante question des congés bonifiés,
que je souhaite simplifier et uniformiser les critères d’attribution de ces congés
car il n’est pas normal que l’octroi de ce droit dépende de l’appréciation
discrétionnaire de chaque administration ou établissement public.
Enfin, je pense qu’il faut revoir la façon dont la mobilité et la promotion sont
organisées dans la fonction publique entre la métropole et l’outre-mer. La
mobilité des fonctionnaires est une bonne chose mais je crois qu’il faut savoir
adapter nos exigences au contexte particulier de l’outre-mer. Certains concours
nationaux doivent être organisés localement afin de pourvoir des postes locaux.
En revanche, je vais être honnête : je pense qu’il ne serait pas conforme aux
principes républicains que ces recrutements soient réservés aux seuls domiens.
Imaginerait-on que les domiens soient écartés des concours organisés en
métropole? Je suis pour le volontarisme mais contre une logique de quotas qui se
retournerait contre les Ultramarins eux-mêmes en créant un doute sur la réalité
de leurs mérites. Vous n’attendez pas la charité, vous demandez l’égalité des
chances ! Voilà ce pourquoi je me bats depuis le début!
*
Mes chers amis,
Je n’ai fait ce soir que tracer, à grands traits, mon projet pour vous.
Ma plus grande frustration, durant cette campagne, est de ne pas avoir pu me
rendre dans tous les territoires d’outre-mer où, pourtant, j’étais attendu. Je
pense à Mayotte, à la Polynésie, à la Nouvelle-Calédonie, à Saint-Pierre et
Miquelon, ainsi qu’à Wallis et Futuna. C’est pourquoi je me suis adressé
directement à ces territoires en envoyant aux populations une longue lettre
personnelle précisant mes principaux engagements pour eux.
Ce soir, si vous me le permettez, je voudrais dire aux Mahorais, aux Polynésiens,
aux Calédoniens, aux Wallisiens et Futuniens, aux Saint-Pierrais et Miquelonais
que je pense à eux. Qu’ils ont, dans mon coeur, la même place que les autres
Français d’outre-mer, c’est-à-dire une place toute particulière. Je sais que vous
avez plus besoin de moi que d’autres Français et je ne vous oublierai pas.
Ma personnalité est différente de celle des hommes politiques que vous avez
connus. Je ne suis pas un adepte des grands discours compassionnels ; je ne
suis pas, non plus, un adepte des déclarations d’amour le matin, le midi et le
soir, qui finissent par perdre tout leur sens.
L’engagement total dans l’action, la volonté d’apporter des idées neuves et le
refus de la fatalité, c’est ma façon…peut-être plus authentique…de vous aimer.
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