Rapport d’observations définitives de la chambre territoriale des comptes concernant la construction des bâtiments de la présidence...
Intervention de Monsieur Gaston FLOSSE,
Sénateur et représentant à l’Assemblée de la Polynésie française
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Jeudi 28 septembre 2006 à 9h00 – Assemblée de la Polynésie française
Monsieur le Président de la Polynésie française,
Monsieur le Président de l’Assemblée de la Polynésie française,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les Représentants,
Le rapport de la chambre des comptes sur la construction des bâtiments de la Présidence a un grand mérite : il apporte un démenti catégorique aux mensonges et aux calomnies de M. Temaru qui affirmait sur les ondes, dans la presse et ici même, à l’Assemblée, que la construction de la Présidence avait coûté 11 milliards. Nous savons depuis longtemps, et toute la population commence aussi à savoir, que M. Temaru est le champion du mensonge et de la calomnie systématiques. La chambre des comptes le confirme aujourd’hui.
Le rapport nous dit que, je cite, « le coût total des travaux réalisés, tel qu’il a pu être établi par la chambre est de 3,5 milliards ». Cette évaluation confirme exactement le chiffre que j’avais annoncé ici même lors d’une réponse à M. Geros que RFO a redifusée dimanche soir. Nous n’arrivons pas à la moitié de la somme citée par M. Temaru, même si on y ajoute le mobilier et les équipements évalués par la chambre à 1,1 milliard. Il faut ajouter une précision importante : l’Etat nous a accordé une subvention de 600 millions pour réaliser ce projet et il a en outre concédé une différence de 400 millions dans les échanges de terrain.
Au total la participation de l’Etat a donc été de 1 milliard. En définitive le coût de la construction pour notre budget n’a été que de 2,5 milliards, et non pas 11 milliards, Mesdames et Messieurs du Tavini. C’est cela la vérité.
Je prends acte avec satisfaction de cette mise au point de la chambre des comptes. Mais certaines allégations contenues dans son rapport appellent quelques observations et rectifications de ma part. Je ne commenterai évidemment pas tous les détails techniques et financiers traités dans le rapport.
J’aborderai seulement quatre points qui comportent des critiques explicites ou implicites adressées au maître d’ouvrage.
Premier point : Le dépassement de l’enveloppe initiale.
Le rapporteur signale à juste titre que le coût initial était évalué à 1,5 milliard alors que la dépense finale s’est élevée à 3,5 milliards. C’est vrai.
Mais il est faux de dire ou de laisser entendre qu’il s’agit là d’un dépassement injustifié et que, je cite, «la principale raison de cette dérive tient à la modification du programme par le maître d’ouvrage qui, au fur et à mesure de l’avancement du chantier, a exigé de nombreuses modifications ».
Cela est faux. Les modifications demandées n’ont jamais eu un tel impact financier. Bien au contraire, elles témoignent de la vigilance et du sérieux apportés par le maître d’ouvrage au suivi d’un chantier qui a duré quatre années.
Le dépassement du coût initial a une explication simple, vérifiable et indépendante de la volonté du maître d’ouvrage. Le projet initial prévoyait la réhabilitation et le réaménagement d’un bâtiment.
L’Etat nous avait assuré qu’il était parfaitement utilisable. Mais l’expertise technique réalisée au début des travaux de réhabilitation a conclu à l’impossibilité, pour des raisons de sécurité, de conserver les bâtiments existants. Les murs de chaux, épais de 60 cm, tombaient en poussière et les structures métalliques étaient rouillées.
Ce qui n’a rien de surprenant quand on sait que la caserne Broche a été construite en 1886, c’est à dire près de 120 ans auparavant.
Cette décision a considérablement modifié l’économie du projet, mais elle ne résulte pas, contrairement aux affirmations du rapporteur, de la volonté du maître d’ouvrage.
Cette décision qui impliquait un retard et un surcoût regrettables, je ne l’ai ni souhaitée ni provoquée. Ma volonté était de conserver tel quel ce haut lieu de notre Histoire et ce fleuron de notre patrimoine.
Le dépassement de l’enveloppe initiale ne résulte ni d’une dérive, comme l’écrit le rapporteur, ni d’une extravagance, comme il le laisse supposer, mais d’une contrainte technique que personne ne soupçonnait au départ.
L’étalement des travaux sur plusieurs années et le découpage de l’opération en plusieurs tranches sont inévitables pour des projets de cette envergure.
Ils ne sont pas dus à une intention de contourner les règles des marchés mais aux contraintes budgétaires.
Je respecte les compétences juridiques et financières des magistrats de la chambre des comptes, mais lorsqu’ils prétendent juger les intentions et les motivations d’un homme, ils franchissent à la fois les limites de leurs attributions et le seuil de leurs compétences.
Deuxième point : Le respect de la mise en concurrence.
Le rapporteur estime que, je cite, « les règles du code des marchés publics ont été interprétées de manière à réduire la mise en concurrence ».
Et il s’appuie sur deux constats : la reconduction systématique du même maître d’œuvre à chaque nouvelle tranche de travaux et la déclaration d’infructuosité de plusieurs appels d’offres.
J’observe que ce qui est en cause c’est l’interprétation des règles mais le rapporteur ne dit pas que les règles ont été violées.
Je m’insurge contre les insinuations du magistrat de la chambre des comptes qui prétend, ici encore, juger non les actes mais les intentions du maître d’ouvrage. De quel droit ?
La reconduction du maître d’œuvre relève du simple bon sens et de la volonté d’assurer la cohérence de l’ensemble du projet.
Qu’est-ce qui autorise le rapporteur à suspecter une intention de contournement des règles ?
De même, lorsqu’un appel d’offres est déclaré infructueux, c’est parce que la personne responsable du marché constate qu’il n’y a aucune offre qui corresponde aux exigences de qualité, de délai et de prix prévus. Cette procédure est non seulement régulière mais souvent nécessaire à la bonne gestion des deniers publics.
C’est bien dans cet esprit que certains appels d’offres ont été déclarés infructueux.
Au nom de quel droit et de quelle compétence surnaturelle le rapporteur peut-il dire que cette procédure parfaitement régulière a été mise en œuvre dans une intention critiquable ?
Troisième point : Les passer outre suite à un refus de visa du CDE.
Le rapporteur relève une douzaine de cas où le maître d’ouvrage a signé un passer outre suite à un refus de visa du contrôleur des dépenses engagées.
Ces refus de visa étaient généralement motivés par le retard de transmission des avenants qui auraient dû lui être soumis avant l’exécution des travaux.
Cette observation est justifiée. Il est vrai que j’ai parfois privilégié la rapidité d’exécution des travaux sans m’assurer que les avenants avaient bien été transmis en temps voulu au visa du CDE.
Dans ces cas-là le refus de visa du CDE était justifié et le maître d’ouvrage n’avait pas d’autre solution que de signer un passer outre pour que les travaux réellement effectués soient payés.
Le recours à cette procédure est toujours regrettable, mais il n’est pas irrégulier. Il y a eu des retards mais aucun document n’a été oublié ou dissimulé ; tout a été transmis et contrôlé.
Quatrième point : Un coût global excessif.
Le rapporteur n’écrit jamais que le coût global de l’opération est excessif mais c’est manifestement l’impression qu’il essaie de donner.
Comme le coût de la construction ne lui paraît pas assez élevé, il s’empresse d’ajouter tous les achats de mobilier et d’équipements. Il compte non seulement ce qui a été acquis pour la mise en service du bâtiment, mais également toutes les dépenses d’entretien, de complément ou de renouvellement de matériels effectuées en 2001, 2002 et 2003, c’est à dire trois ans après l’achèvement de la construction et la mise en service des bâtiments au début de l’année 2000. Là, vraiment, il exagère.
Il m’impute même le gaspillage de 41 millions payés pour une statue du Général De Gaulle qui n’a jamais été achevée ni livrée. Il se trompe de responsable. Il aurait dû signaler que M. Temaru, qui a refusé de faire achever et livrer cette statue, est le seul coupable du gaspillage des 41 millions.
Le rapporteur fait clairement comprendre, sans avoir la franchise de l’écrire, que le maître d’ouvrage a voulu construire un bâtiment trop prétentieux et trop luxueusement équipé et meublé.
Il s’étend avec complaisance sur des détails tels que les 20 caisses en bois d’un montant total de 179 000 F. C’est un peu dérisoire pour un chantier de plusieurs milliards, mais cela permet au rapporteur de préciser que ces caisses étaient du type, je cite, « château de Versailles » et que l’enseigne du fournisseur était, je cite, « Les jardins du roi soleil ». Et voilà comment on peut suggérer, sans le dire, que le maître d’ouvrage se prenait pour Louis XIV et que les bâtiments de la Présidence sont aussi somptueux et ruineux que le fut la construction de Versailles au XVII° siècle.
Le procédé manque un peu de finesse et surtout d’honnêteté intellectuelle.
Il nous révèle les sentiments personnels du rapporteur mais ne nous apprend rien sur la valeur raisonnable ou excessive des travaux réalisés.
Essayons donc de revenir aux faits établis. La construction a coûté 3,5 milliards. Est-ce excessif ? Excessif par rapport à quoi M. le rapporteur?
Excessif par rapport à quoi, M. Temaru ?
Est-ce excessif par rapport à l’achat de votre hôtel en Nouvelle Zélande, un hôtel classé, inutile et vétuste ?
Votre hôtel a coûté 650 millions à l’achat et son prix total approchera 2 milliards, que paieront les Polynésiens, lorsqu’on aura ajouté la rénovation, les équipements et les taxes qui enrichiront le budget néo-zélandais.
Est-ce excessif par rapport au prix moyen de la construction à l’époque ? Certainement pas. La surface totale des bâtiments est de 15 000 m2, ce qui établit le coût total de construction à 220 000 F le m2. Combien y a-t-il au centre ville de bâtiments de cette qualité construits à un coût inférieur au m2 ? Vous le savez comme moi, il n’y en a pas.
Etait-il abusif de vouloir construire au lieu de se contenter de louer quelques bureaux anonymes dans un immeuble quelconque ? Mais les loyers dans ce genre d’immeuble sont d’environ 2 500 F par mois au m2. C’est ce que paie l’Etat pour les services qu’il loge ainsi.
En dix ans nous aurions dépensé des centaines de millions en pure perte. C’est cela qui aurait été de la mauvaise gestion.
Mais peut-être le rapporteur estime-t-il qu’un banal immeuble de bureaux ou des fare MTR auraient été encore trop bien pour la Présidence de la Polynésie française. Après tout, nous sommes restés pendant plus de 15 ans dans un simple logement de fonction, celui des directeurs de cabinet des gouverneurs. Cette modeste construction ressemblait à une loge de concierge devant les grilles imposantes et les magnifiques jardins du haut-commissariat. Aux yeux du rapporteur c’était certainement suffisant pour les indigènes maohi que nous sommes.
Il juge sans doute prétentieux pour des Polynésiens de faire construire un beau bâtiment pour héberger la première institution du pays !
Dans cette affaire, Mesdames et Messieurs les Représentants, comme l’a relevé le rapporteur, je reconnais être responsable d’avoir transmis trop tardivement au CDE des documents qu’il aurait dû viser avant tout commencement d’exécution des travaux. Mais il n’y a jamais eu manquement aux règles administratives, le recours au passer-outre est une procédure régulière. Jamais il n’y a eu violation du code des marchés.
Toutes les dépenses ont été contrôlées. D’ailleurs le rapporteur de la chambre des comptes, malgré son désir évident de nous coincer, est oblig é de reconnaître qu’il n’y a eu aucune fraude, aucun détournement des fonds publics.
M. Temaru, citez moi un seul passage qui m’accuse, comme vous le faites, d’avoir fraudé.
Mesdames et Messieurs les Représentants de la Polynésie française, chers concitoyens, derrière toute cette mise en scène il n’y a aucune fraude, aucun détournement de fonds publics.
Je voulais que vous le sachiez. Et, lorsque les passions haineuses, provoquées et constamment alimentées par le Tavini, seront apaisées, ce que retiendront tous les citoyens de bonne foi c’est la réalisation, sans gaspillage et sans détournement de fonds, du plus beau bâtiment public de notre patrimoine.
J’ai la conviction que j’ai initié et mené à bien, sans gaspiller l’argent des contribuables, la construction d’un ensemble immobilier adapté à nos besoins et à nos moyens. Ce bâtiment n’est pas la propriété de Gaston Flosse.
Il fait honneur à notre pays et je sais que les Polynésiens en sont fiers. Il fait partie du patrimoine de notre pays.
M. Temaru l’avait violemment critiqué. Il avait juré de ne jamais y mettre les pieds. Il s’était même engagé à le transformer en maternité. Un mensonge de plus ! Il s’y est précipité avec avidité quand il a pris le pouvoir, et, pour justifier son installation dans ce qu’il appelait le Palais présidentiel, il a déclaré que c’était désormais la maison du peuple.
La population l’a cru. La foule a accouru pour répondre à l’invitation du grand démocrate qui lui ouvrait les portes.
Mais toute cette agitation a bientôt paru gênante à notre grand Tahua Oscar Temaru.
Il s’est donc dépêché de faire fermer les grilles pour interdire au peuple l’entrée dans la maison du peuple. Une Polynésienne, une « bleue », exaspérée par ce revirement a même foncé dans le portail avec sa voiture.
En réalité, M. Temaru apprécie tellement son Palais présidentiel depuis qu’il est au pouvoir qu’il n’a même pas voulu le restituer quand il a été démis de ses fonctions.
C’est à mon avis une appropriation un peu abusive, qu’on m’aurait violemment reprochée si je l’avais commise, mais c’est aussi un magnifique témoignage de la qualité et de la fonctionnalité de ce bâtiment. N’est-ce pas, M. Temaru ?
Je conclurai donc en remerciant M. Temaru pour l’hommage qu’il me rend quotidiennement non par ses paroles, mais par ses actes. Je suis sincèrement touché de l’attachement qu’il montre à tout ce que le Tahoeraa Huiraatira a réalisé et qu’il critiquait autrefois.
le Palais présidentiel, le nouvel hôpital Jacques Chirac, la voie rapide Te Ara Nui, la compagnie Air Tahiti Nui, la Délégation au Développement des Communes, la TVA, l’avion Tahiti Nui, le scrutin majoritaire etc…
Il n’y a que mes horaires de travail et la volonté de rester français qu’il n’a pas repris à son compte.
Mais il ne faut pas désespérer, pour les horaires de travail, cela viendra peut-être ; quand il aura parcouru tous les terrains de golf de la planète et fait du tourisme de luxe dans tous les pays du monde aux frais du contribuable polynésien.
Peut-être même qu’il aura un jour un sursaut d’honnêteté et qu’il dira, comme vient de le faire le Premier Ministre hongrois, je cite, «Nous avons merdé, pas un peu, beaucoup…Il est évident que nous avons menti tout au long des 18 derniers mois. Il est clair que ce que nous disions n’était pas vrai.
Nous n’avons rien fait depuis quatre ans, rien… Au lieu de gouverner, nous avons menti le matin, le soir et la nuit. Je ne veux plus faire ça. »
Si notre président commençait à travailler et à dire la vérité, ce serait déjà un grand progrès. Mais quant au second point, la volonté de rester français, il ne faut pas se faire d’illusions. Jamais il ne renoncera à son obsession de l’indépendance, le plus vite possible et par n’importe quel moyen.
Jamais il ne renoncera à son ambition égoïste de devenir un Chef d’Etat souverain, quel que soit le prix à payer pour la population.
Qu’il sache que le Tahoeraa Huiraatira et la majorité des Polynésiens s’y opposeront toujours et de toutes leurs forces. Et, pour moi, le maintien de la Polynésie française, de notre Pays autonome, au sein de la République restera, jusqu’à mon dernier souffle, le combat de ma vie.
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